Le Sacré-Coeur de Lindthout a 100 ans - Tranche de vie scolaire
A l'occasion de Centenaire de Lindthout, nous allons faire avec
vous un bond en arrière de 80 ans et ouvrir ensemble les livres
d'histoire de la "maison" !
Nos sources seront essentiellement :
-
le "JOURNAL DU PENSIONNAT" rédigé au jour le jour depuis la
fondation par une des aînées parmi les élèves et le "JOURNAL DE LA COMMUNAUTE"
-
Des PHOTOS et DOCUMENTS d'époque …
-
Et bien sûr des TEMOIGNAGES d'anciennes qui ont vécu à Lindthout
de belles et passionnantes années d'adolescence …
De quoi nous replonger dans ce qu'était la vie d'une "maison" du Sacré-Cœur dans la première moitié du siècle passé... |
Les
années 20...
- C'était le temps où la rue Georges Henri prenait son allure
du 20e siècle, où l'entrée du Castel était coiffée de sa calotte
de verre;
- C'était le temps où l'Europe se relevait de la guerre, où Albert
et Elisabeth régnaient en Belgique et fêtaient leurs 25 ans de
mariage;
- C'était le temps où Gandhi en Inde boycottait les produits
européens, où la Sabena lançait audacieusement son premier vol au-dessus du
désert jusqu'à Léopoldville, où la Minerva sortait en force des usines Ford à Anvers...
Durant l'entre-deux guerres, le monde vivait d'importantes
mutations, tant au plan politique et social, qu'au plan culturel.
Le Sacré-Cœur, lui, changeait peu. Il gardait un langage propre,
des termes particuliers, "les charades" pour parler du lieu où
était gardés les déguisements et où flottait une douce odeur de
naphtaline, les "dialogues" qui dans les autres écoles
s'appelaient des séances, la "planche" pour aller à "la
fontaine" (comprenez aux toilettes… ).
Il y avait aussi des
gestes et des comportements qui se retrouvaient aussi bien à Lindthout qu'à Vienne, à Léopoldville ou à Washington,
une
"enfant de nos maisons" n'était en rien dépaysée lorsqu'elle était
transplantée d'Australie en Pologne. Les mêmes usages, les mêmes
fêtes, la même révérence, le même rituel de vie l'attendaient et
l'accueillaient d'un bout du monde à l'autre ! Comme dans toutes
les Congrégations, l'unité se vivait à l'époque dans une parfaite
uniformité entre les maisons. De 1920 à 1924, la princesse Marie-José fut élève à Lindthout :
adolescente bien typée, attachante et fougueuse, elle fut reçue
"Enfants de Marie" le 16 juillet 1904, avant de quitter l'école. |
Ouvrons maintenant le "Journal du pensionnat" :
nous allons y suivre le récit du déroulement de l'année scolaire
1924-1925...
OCTOBRE 1924 |
Premier trimestre |
Jeudi 2
|
Jour de rentrée : des autos frémissantes, des piétons fatigués
s'arrêtent devant la porte de Lindthout. Parents, enfants, paquets… tout s'engouffre dans le Castel qui s'est ouvert bien grand
devant les pensionnaires ! Dans les salons ont lieu les adieux,
des baisers, des larmes parfois, des rires pour les dissimuler…
puis les grandes personnes repassent le seuil du Sacré-Cœur. Les
enfants, elles, un peu tristes d'être séparées de leurs famille
jusqu'à la Toussaint, mais heureuses de retrouver leurs "mères"
si accueillantes et si encourageantes, s'engagent dans le
pensionnat ! Pour les "nouvelles", ce grand corridor, ces
multiples portes sont un terrain inconnu qu'elles abordent avec
curiosité, parfois avec appréhension. Pour les autres, c'est
toujours Lindthout et son monde de vie et de souvenirs. Lindthout,
avec toutes ses joies, avec aussi son travail intellectuel et
moral sérieux. |
Vendredi 3
|
Cette année, au pensionnat, Mère Neyron veille sur nos études.
Mère Devos est notre chère maîtresse générale : c'est elle qui
donne l'esprit de la maison, nous fait chaque semaine une
instruction générale et nous reçoit dans son bureau sur la petite
chaise.
Elle est aidée dans sa tâche par Mère Devilder notre surveillante
générale : elle est avec nous au quotidien et rythme les
mouvements d'ensemble à l'aide d'un claquoir : à la chapelle, on fait la génuflexion avant d'entrer dans les bancs ! Cette année, nous sommes un peu plus de 160
"enfants", de 6 à 18
ans, réparties en 11 niveaux de classe, de la 11e à la classe
supérieure. Chaque classe compte entre 10 et 15 élèves…
Mère Jacquemin est supérieure de la communauté qui compte 89 mères
et sœurs. L'externat est dirigé par Mère Dilleman, avec l'aide, entre autre, de Mère Pousseur, responsable des études et de Mère de Grangeneuve.
Des garçons y sont accueillis chez les tout-petits !
A l'externat, les programmes sont plus libres par rapport au plan
d'études du Sacré-Coeur, aussi des cours de comptabilité, de
langues, de sténodactylo sont inscrits au programme et donnés avec
succès. A l'école gratuite, et à l'ouvroir, Mère Braun veille à
l'éducation des enfants moins favorisées avec l'aide de 9
religieuses.
L'école a un cycle complet de préparatoires. Les élèves peuvent
ensuite y suivre des cours de couture ou des cours pratiques pour
la tenue d'une maison… Voilà pour la présentation extérieure de la grande ruche qu'est la
maison de Lindthout à cette rentrée d'octobre 1924 ! Les mères et les sœurs assument tout l'encadrement des classes,
cours et titulariats, aussi bien que l'organisation pratique de la
maison. Les soeurs coadjutrices sont souvent très aimées. Celles
qui sont en contact régulier avec les élèves à des endroits
stratégiques de l'école sont souvent choisies comme confidentes ou
comme consolatrices dans les moments difficiles. Ainsi, quand à
l'étude, l'une ou l'autre est prise, soit d'un grand chagrin ou
d'un incoercible fou rire, elle s'empresse d'aller chercher "la
planche" pour rejoindre Sœur Bousson à la "fontaine" (comprenez
les toilettes ) ! D'autres aiment se faire doucement dorloter par
Sœur Heller à l'infirmerie ! Tiens… je vous redis en passant mais vous l'aurez déjà compris,
Ste Madeleine-Sophie, la fondatrice de la Congrégation du Sacré-Cœur
souhaitait que le style de vie de la "maison" soit celui d'une
"famille". Nous, les élèves sommes d'ailleurs appelées les
"enfants" des "mères" qui nous éduquent ! Avant d'enseigner, le but est bien d'éduquer des jeunes filles
pour qu'elles deviennent des femmes, des mères de famille
chrétiennes capables de prendre et d'assumer leurs responsabilités
dans la société. |
Dimanche 5 |
Avant de nous plonger dans la vie un peu monotone des
pensionnaires, (nous ne rentrerons à la maison qu'à la Toussaint…
puis à Noël) les Mères nous ont ménagé un dimanche agréable et
extraordinaire ! Nous avons joué dans toute la maison et couru
dans tout le jardin : que d'éclats de rire partout… Avec quel
plaisir anciennes et nouvelles apprennent à se connaître ! |
Lundi 6 |
Voici lundi et son travail sérieux mais combien intéressant au
point de vue intellectuel et passionnant au point de vue moral
pour ceux qui aiment lutter, se dépasser et se vaincre ! |
Lundi 20
|
Aujourd'hui, l'école était en fête pour célébrer Mater Admirabilis
dont la fresque originale est à Rome, à la Trinité des Monts.
Image de la Vierge Marie jeune, ayant arrêté un instant de filer
la laine, elle a sa place dans tous les Sacré-Cœur du monde et
incarne pour les adolescentes, la vie intérieure dans les
activités quotidiennes. Aujourd'hui, comme aux autres fêtes de la Vierge, les aînées qui
en ont exprimé le désir sont reçues dans la Congrégation des Anges
ou des Enfants de Marie. Elles ont reçu la médaille et la règle de
vie de leur engagement. Pour les plus jeunes, désireuses, elles
aussi, d'un engagement de foi plus explicite et plus personnel, il
y a la Congrégation de St Louis de Gonzague, patron de la jeunesse
et pour le petit pensionnat, la Congrégation de l'Enfant Jésus.
Régulièrement, chaque congrégation a une réunion au cours de
laquelle la Mère qui en est chargée aide chacune à grandir dans la
générosité, la prière, l'amour du Cœur de Jésus et des autres.
Ce soir, à la "vie de famille", a eu lieu "l'enterrement des
nouvelles" : une soirée de tradition au Sacré-Cœur préparé par
les anciennes : une soirée chaleureuse et festive d'accueil des
nouvelles recrues ! A partir de la fête de Mater, celles qui sont
venues nous rejoindre au Sacré-Cœur, sont considérées comme
faisant partie de la "famille"… Il n'y a plus de "nouvelles"
parmi nous ! |
Dernier dimanche
du mois |
Une cérémonie particulière a souligné ce matin la fête du Christ-Roi
: dans une longue et impressionnante procession, chacune des
élèves d'origine ou de nationalité différente est entrée
solennellement à la chapelle en portant fièrement le drapeau de
son pays. Nos cœurs vibraient au monde entier… Lindthout vit là une large internationalité, construit déjà
l'Europe et le monde !
|
NOVEMBRE 1924 |
|
du samedi 1er
au lundi 3 |
Nous passons la Toussaint à la maison et les Mères nous rappellent
de prier pour notre grande famille du ciel et de la terre ! |
Lundi 3 |
Retour à l'internat pour deux mois de travail sérieux et parfois
ardu : dans les classes terminales, l'accent est mis principalement sur
l'enseignement de la religion et de la philosophie chrétienne.
Viennent ensuite des cours passionnants de langue et de
littérature française donnés par Mère Hurel. La composition,
l'histoire littéraire et des beaux-arts, l'élocution mais aussi
l'écriture, l'orthographe, la grammaire, font l'objet d'exigences
très sérieuses. Ainsi, pour entrer dans l'académie Léon XIII,
fondée au Sacré-Cœur de Jette en 1844, par le nonce apostolique,
Mgr Pecci, futur Léon XIII, il faut, entre autre, avoir une
orthographe "suffisante", c. à d. avoir fait un maximum de 6
fautes en 15 jours ! Inutile de vous dire les efforts énormes que
nous faisons pour écrire sans fautes !
Il y a aussi le latin, l'algèbre et la géométrie, la physique. La
géographie et l'histoire pour les classes plus jeunes…
sans oublier, bien sûr le cours d'ouvrage qui, il faut bien
l'avouer, nous sert parfois de détente !
Dans le plan des études, il n'y a pas trace de temps donné à
l'éducation physique ou au sport ! Les jeux durant les récréations
en tiennent sans doute lieu ! |
Mardi 11 |
Il y a 6 ans, l'Europe poussait un profond soupir de
soulagement : enfin l'armistice était signé ! L'honneur triomphe
et la force est vaincue ! Lindthout fête cet anniversaire en
s'amusant avec des grands jeux de drapeaux entre les cours. C'est
notre manière de célébrer l'héroïsme bien connu de nos soldats,
héroïsme qui nous enthousiasme et nous fait lutter pour chasser
l'envahisseur… et cela jusqu'à la victoire ! |
Vendredi 21 |
Fête du petit pensionnat. L'enfant la plus fidèle à la "pratique" choisie pour préparer la fête (pratique de travail ou de silence
ou de bonne tenue ou de politesse ou de prière …), est choisie
comme "Petite Marie" : elle représente respectueusement la Vierge
Marie enfant, présentée au Temple par ses parents et porte ce jour-là, pour la procession et l'entrée solennelle à la chapelle, un
voile blanc, une longue robe blanche avec une ceinture bleue. |
Mardi 25 |
La Sainte-Catherine est notre fête, à nous
les aînées de la maison. Ce matin, les secondes ont organisé pour
nous une séance humoristique où elles nous ont attribué à chacune
des paroles de sagesse !
L'après-midi, c'était à nous de leur faire une
surprise en leur présentant en tableau vivant, "L'école d'Athènes" du peintre Raphaël. Chacun des personnages de la scène s'est
ensuite animé en l'honneur de nos spectatrices !
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DECEMBRE 1924 |
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Lundi 8 |
Fête de l'Immaculée Conception ! C'est avec émotion que j'ai vécu
pour la dernière fois la procession des lys! Après le salut, en
voile blanc, gants blancs et le lys à la main, nous quittions la
chapelle en ordre parfait, les plus petites en tête, en chantant
des cantiques à la Vierge. Traverser la galerie, la salle d'étude,
la chapelle de la Sainte Vierge gracieusement ornées pour l'occasion
de feuillages et de jeux de lumière, saluer au passage toutes les
statues ou tableaux de la Vierge et aboutir dans la grande salle
largement décorée de fleurs et de plantes… quelle belle et
longue procession ! Là attendaient les Mères, les professeurs, les
anciennes et les mamans venues pour l'occasion, toutes ensemble
nous avons refait de tout coeur notre consécration à la Sainte
Vierge. La procession s'est terminée ensuite à la chapelle où,
dans un geste très prenant, nous avons chacune déposé nos lys,
symboles de notre vie, au pied de la Vierge pour qu'elle en prenne
soin. |
Mercredi 10 |
Une journée de congé "sans cloche", c'est à dire bruyante et
parlante, en l'honneur de la Révérende Mère de Loe, supérieure
générale de la Congrégation à Rome ! Au programme : grand jeu
missionnaire dans toute la maison et le jardin : il s'agit
d'atteindre un poste de mission éloigné et pour cela, il faut
éviter des crocodiles et des tigres, contourner des forêts
tropicales, traverser des torrents et des cascades, frôler le
martyr, recevoir des messages… De quoi rejoindre en esprit les
expéditions de grands explorateurs… |
Lundi 15 |
Nous commençons la "neuvaine des pommes de terre" en préparation
à la fête de Noël ! Au pied de la crèche, a pris place un sac de
jute plein de pommes de terre et, à côté, un grand panier vide.
Chaque matin, avant de monter en classe, nous passons devant la
crèche en chantant "Venez Divin Messie" et celles qui ont fait
la pratique, l'effort auquel elles s'étaient engagées (silence en
classe ou dans les rangs, ou un effort de travail ou un effort
relationnel ou de prière…) prennent une pomme de terre du sac de
jute pour la déposer dans le grand panier. Celui-ci sera ensuite
donné aux pauvres.
C'est une manière originale que les Mères ont trouvé de nous
ouvrir le cœur, non seulement au partage mais aussi à
l'engagement personnel dans ce partage puisque les pommes de terre
sont le fruit d'un engagement choisi personnellement et tenu. |
Mercredi 24 |
Cette année encore nous passerons la fête de Noël au Sacré-Cœur et
nous rejoindrons nos familles le 26 ! Etre le 25 décembre au
Sacré-Cœur et non dans notre famille est un bonheur… un peu amer
pour certaines, mais unique : à l'instruction générale, Mère Devos
nous prépare le cœur pour qu'à minuit nous soyons habitées par la
foi des bergers, la louange des anges, l'humilité de Saint Joseph,
l'amour brûlant de Marie…
La messe de minuit et de la journée de Noël, sont un festival de
joie et de chants… |
Vendredi 26
(au matin)
|
Remise des bulletins et des rubans :
bleus pour les classes supérieures, verts pour les moyennes et
roses pour les plus jeunes. Les rubans se méritent par un
comportement qui se veut un exemple de bonne conduite et de
responsabilité. Les aînées parmi nous qui sont "ruban bleu"
(bleu clair pour les internes, bleu foncé pour les externes) sont
les rouages de confiance entre les élèves et les mères. Souvent,
l'une de nous surveille l'étude quand Mère Devilder en est
empêchée. Souvent aussi les petites en mal de famille nous sont
spécialement confiées.
|
JANVIER 1925 |
Deuxième trimestre |
Dimanche 4
(soir) |
C'est la rentrée pour le trimestre où nous fournirons un travail
fort et régulier : c'est le trimestre du travail par excellence ! |
Lundi 5 |
De suite on se met à l'ouvrage avec une ardeur toute spéciale :
dès aujourd'hui nous entreprenons la pratique pour la fête de Mère
Devos, notre chère maîtresse générale. Cette fois, la pratique est
une grande campagne de volonté organisée par Mère Devilder. Il
s'agit, coûte que coûte, d'avoir toujours le maximum de points de
leçons en classe et à l'instruction religieuse. L'exactitude est
poursuivie également comme très apte à forger une volonté de fer.
Ainsi nous deviendrons, comme le souhaitent les Mères, des "femmes
de caractère" ! Aujourd'hui, c'est l'Epiphanie ! Suivant nos traditions, nous
tirons les rois. Pour fêter la nouvelle famille royale, Mère Louis
nous accorde une triple faveur : un parlement (comprenez :
permission de parler pendant le repas de midi), une partie de
cache-cache et une classe de primes (comprenez : classe très
amusante, et concours de toutes sortes préparés par notre titulaire). Nous sommes aux anges ! |
Dimanche 18 |
Ce matin, il faut signaler un brillant examen d'Académie : celui
de Christiane Pastur et de Marie-Thérèse de Wilde ! Elles seront
reçues académiciennes pour la fête de la semaine prochaine. |
Vendredi 23 |
Voilà enfin ce jour bien désiré : c'est la fête de Mère Devos ! En
lui offrant le fruit de notre pratique, nous aimons lui dire notre
reconnaissance pour l'esprit de famille qu'elle fait régner entre
nous, petites et grandes, et surtout pour les instructions
religieuses hebdomadaires !
Le "dialogue" (comprenez : la séance, cette fois théâtrale) est
une brillante interprétation par la classe supérieure du "bourgeois gentilhomme" où les talents de chacune ont pu trouver
leur place.
Puis c'est l'ouverture du congé et du grand jeu qui nous conduira
en pèlerinage jusqu'à Rome à travers mille péripéties ! C'est une
gaieté folle !
En fin de journée un moment de "vie de famille" nous réunit à
nouveau autour de Mère Devos dans un temps de partage et d'écoute
mutuelle sur ce qui s'était vécu dans la journée. |
du lundi 26
au samedi 31 |
Voilà la grande semaine… celle de la retraite prêchée cette année
par le Père Houyet. Tout le monde y entre avec d'excellentes
dispositions ! En pleine retraite, nous apprenons que la
canonisation de notre fondatrice, Madeleine-Sophie Barat, est fixée à
Rome le 25 mai !
|
FEVRIER 1925 |
|
Mercredi 18 |
Visite inattendue de l'inspecteur… mais tout se passe bien et le
parlement de midi nous remet de cette petite émotion ! |
Samedi 21 |
Avant de partir en congé, la séance des notes nous rassemble à la
grande salle. Comme chaque samedi, elle est présidée par Mère
Louis, supérieure de la maison.
Toute l'école s'y trouve réunie et salue par une révérence,
l'entrée de la "‘Révérende Mère". Elle est suivie du cortège des
Mères. Dès qu'elles sont installées, la surveillante générale
donne le signal et nous pouvons nous asseoir, dos droit, pieds
joints, le regard tourné vers les Mères. Ensuite, chaque classe
est appelée, s'avance au milieu de la salle et, une à une, nous
recevons la note méritée au cours de la semaine :
-
Marguerite Marie Braffort : Bien pour le travail en clase;
-
Janine Bossu : Bien pour l'attitude et le silence à la salle
d'étude;
-
Madeleine de Liedekerke : Très Bien;
-
Simone Jourdain : Assez bien pour une désobéissance.Le médiocre ou
"n'a pas mérité de note", d'ailleurs très rare,
est le dernier stade avant les grandes mesures !
Au moment où elle est nommée, l'élève esquisse une révérence, puis
toute la classe passe en file indienne devant la Révérende Mère
pour recevoir son bulletin et un petit mot personnel
d'encouragement. |
du samedi 21
au mercredi 25 |
4 bons jours en famille nous préparent bien à la fin du trimestre. Mère Devilder nous met en garde contre la sortie de jours gras.
Au retour, elle ne veut pas avoir à faire à des "crins" ! Après avoir fêté le mardi gras, s'ouvre le temps du
Carême où la
générosité est suscitée, générosité dans le comportement pour une
vie quotidienne plus conforme à ce qui est "beau" et à ce qui
est "grand" et générosité dans le partage avec les plus pauvres.
Le souci d'ouvrir les jeunes à la dimension sociale est réel :
beaucoup d'élèves avaient "adopté" une famille pauvre du
quartier et lui rendaient régulièrement visite, chargées de
paquets de nourriture et de surprises pour les enfants.
Durant ce Carême 1925, un missionnaire de Chine est accueilli dans
la maison de Lindthout et ouvre les élèves à l'évangélisation de
cet immense continent.
C'est à cette époque que sont nommés à Rome les premiers évêques
chinois. Lindthout participe ainsi au mouvement d'ouverture de l'Eglise.
|
MARS 1925 |
|
|
Dès le mois de mars, commencent les concours des Académies.
Travail ardu surtout quand il s'agit du concours d'arithmétique ou
de latin. En histoire, il nous est demandé d'enregistrer de
mémoire une foule de dates !
Suivra le concours de religion, par classe de cours. Pour les
aînées, il s'agit d' "Expliquer l'essence du péché originel"
devant un jury où siège Monsieur l'aumônier. On comprend
l'inquiétude de certaines élèves devant un tel sujet ! |
du lundi 9
au mercredi 11 |
Le trimestre se termine par les cérémonies de la semaine
sainte : le lavement des pieds du Jeudi Saint, le chant des
lamentations de Jérémie le Vendredi Saint et la préparation de
Pâques.
|
AVRIL 1925 |
Troisième trimestre |
Lundi 6
|
Comme à chaque rentrée, nous commençons le trimestre par la
réunion des charges : chacune reçoit ainsi sa place et une
responsabilité dans la vie de la maison : ce sont des "charges
honorifiques" et ce nom dit bien qu'au Sacré-Cœur, c'est un
honneur de servir, entre autre :
-
(X) comme adjutrice pour veiller à l'ordre de la salle d'étude ou
des classes : ramasser les papiers, effacer le tableau, ranger les
chaises …un service quotidien qui demandait attention et
dévouement;
- (X) comme réglementaire, en rappelant par la cloche, avec une
exactitude qui ne permet aucune faille, les différentes activités
de la journée;
-
(X) comme bibliothécaire ou encore comme archiviste pour veiller à
la distribution et au rangement des carnets de chants lors des
célébrations;
-
(X) la responsable de la bourse des pauvres est toujours un "ruban bleu" : c'est elle qui gère les dons faits aux familles
que nous visitons. Cette charge de confiance est
considérée comme un grand honneur : celui de veiller au bien des
plus pauvres.Recevoir une charge, c'était recevoir une responsabilité, une
délégation. Il fallait apprendre à assumer jusqu'au bout ce
service parfois onéreux et à la fin du trimestre on recevait une
note d'évaluation.
|
MAI 1925 |
Mois de Marie |
|
La tête couverte du voile noir, tous les jours
après le goûter, nous participons au "salut" dans la grande
chapelle ! |
Dimanche 3 |
Avec un peu d'avance (car le 11 mai, plusieurs d'entre nous seront
à Rome pour la canonisation de Sainte Madeleine-Sophie) nous fêtons Jeanne
d'Arc : c'est l'occasion pour nous les belges d'offrir une journée
de congé et de fête à nos compagnes françaises et de cimenter
ainsi nos amitiés ! Cette année 1925 est l'année de la
canonisation de Sophie Barat à Rome !
Femme d'une grande culture, habitée par Dieu et ouverte aux
situations de son temps, elle aimait dire : "J ‘ai deux passions
: le Cœur de Jésus et les enfants". C'est dans ce double
dynamisme personnel qu'elle avait fondé en 1800 la Congrégation
du Sacré-Cœur, bâtie sur l'amour du Cœur de Jésus et donnée, par
vocation, à l'éducation de la foi.
Pendant plusieurs semaines de ce mois de mai, Lindthout a
accueilli des Mères des Etats-Unis, du Canada… en route vers Rome pour
les fêtes de la canonisation. Chaque fois, elles rencontrent les
élèves qui découvrent ainsi de manière bien concrète, la dimension
internationale de la Congrégation. |
Vendredi 8 |
Quel ordre, quelle rectitude dans la tenue des élèves…
pourquoi des pas pondérés au lieu de courses folles dans les
corridors ? Ne devinez-vous pas ? Lindthout doit paraître une
perfection aux yeux des Mères américaines et autres qui le
visitent en se rendant à Rome pour assister à la canonisation ! |
Samedi 9 |
Une délégation d'élèves de Lindthout part pour Rome en train dès
le 9 mai. Elle représente la maison pour les fêtes de la
canonisation.
Quelques unes d'entre nous ont assisté à l'embarquement, à la gare
du Luxembourg. Le train était immense, le quai bondé; on a même
crié "Vive le Sacré-Cœur" ! |
Samedi 23
Dimanche 24 |
Dans chaque maison et bien sûr à Lindthout, la
canonisation est l'occasion de grandes festivités : décorations,
célébrations, dialogues, chants, Te Deum, Messe pontificale
présidée par le nonce… rien ne manquera à ces magnifiques
cérémonies auxquelles participeront les anciennes, les familles,
les amis de la maison.
Qu'il fut beau aujourd'hui le Te Deum en l'honneur de celle que
nous appelons maintenant Sainte Madeleine-Sophie, Te Deum auquel
la Princesse Marie-José, ancienne de la maison, a voulu s'unir !
Nos cœurs sont dilatés par le bonheur !
|
JUIN 1925 |
Mois du Sacré-Coeur |
Mardi 2 |
Après-midi de rencontre avec les élèves des
Sacré-cœur de Jette et de la rue du Grand Cerf.
|
Dimanche 21 |
Fête du Saint Sacrement : la fanfare des
aveugles qui participent régulièrement aux grandes fêtes de la
maison vient animer la procession. Le tapis de fleurs s'étend dans
le jardin, jusqu'à la statue du Sacré-Cœur où est élevé le
reposoir. 500 à 600 personnes (familles, anciennes, amis de la
maison et du quartier et de la paroisse Saint Henri) participent à la
cérémonie et prient agenouillées par terre. |
Vendredi 24 |
La fête du Sacré-Cœur est célébrée avec faste !
Elle avait été préparée par une semaine de "pratique"… apostolique ou de charité ou d'intériorité… selon l'âge des
élèves, afin de s'habiller le cœur pour vivre pleinement LA fête
centrale de la maison.
Cette année, elle a revêtu un caractère spécial car c'est ce même
jour que le Cardinal Mercier est venu donner le sacrement de
Confirmation aux plus jeunes de la maison.
|
JUILLET 1925 |
|
Samedi 4 |
Jour de congé sans cloche pour la fête de la
digne, Mère Jacquemin, supérieure de la maison ! Après la messe de
7h30, petit déjeuner au jardin par classe : on s'installe dans les
coins ombragés tout en bavardant gaiement ! Puis vient la
présentation du "dialogue" préparé par la classe supérieure.
Cette fois il s'agit d'une pièce amusante intitulée : "les deux
locataires" ! Durant l'après-midi : "foire" des missions à laquelle sont invités
nos parents, nos familles, les anciennes et amis. Le profit de la
journée ira aux maisons d'Afrique et aux "œuvres" de Lindthout.
Il y a de nombreuses boutiques où chacun peut faire ses achats. On
se réjouit de la belle recette !
Les concours prennent aussi leur place en cette fin d'année…
entre une journée de pèlerinage à Jette (en tram) et le fête
nationale du 21 juillet, le travail garde son importance, si bien
que les concours de religion ont lieu le dimanche ! |
Lundi 27 |
En ce dernier jour de l'année, a lieu la distribution des
prix présidée cette année par Mgr Périer. La remise des prix est
un moment important de la vie de la maison. L'ouverture officielle
de la séance se fait, suivant la tradition, par cette phrase
proclamée par la maîtresse des études : "Honneur et gloire à Dieu
seul". Vient ensuite l'énumération des prix d'après le palmarès de
l'époque, la remise des croix, des couronnes et des rubans.
Après la distribution des prix, les élèves, en voile blanc,
entrent solennellement à la chapelle, en deux rangées, et déposent
leurs couronnes au pied du Saint Sacrement. Quand toutes les élèves
sont "entrées dans les bancs", l'orgue donne les premiers accords
du cantique d'adieu chanté en choeur par toute l'école et avec une
émotion particulière par celles qui quittent définitivement le
Sacré-Cœur :
"Que pas une ne manque,
au rendez-vous du ciel…,
au rendez-vous du ciel…"
|
Merci à Soeur Chantal de Jonghe pour cette chronique (source : diaporama
réalisé dans le cadre de la fête du Centenaire)
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