Si
Sainte Madeleine-Sophie fonda une Société religieuse qu'elle
appela aussitôt «Société du Sacré-Cœur», ce fut certainement
pour remplir une mission que lui avait confiée le Christ en Croix.
On peut être assuré que son inspiration lui vint directement du
Cœur de Jésus dans l'oraison et particulièrement de l'étude de
Saint Jean et de Saint Paul, les deux apôtres dont elle commentait
le plus fréquemment les écrits. Sans doute fut-elle l'héritière des lumières qui avaient
éclairé déjà l'âme des grandes contemplatives des siècles
précédents.
Mais son originalité est au-delà. Elle ne fut pas à proprement
parler une simple disciple de ces mystiques du Moyen-Age, dont
elle ne suivit pas les voies extraordinaires, ni de Saint Jean
Eudes, dont le nom ne paraît pas dans ses lettres et conférences,
ni de Marguerite-Marie, la Sainte Visitandine de Paray, qu'elle
propose seulement comme modèle de sainteté héroïque.
La source directe, authentique et presque unique de ses vues et
de ses convictions personnelles sur sa mission de Fondatrice, fut
la contemplation du Cœur de Jésus dans l'Evangile et les Epîtres
de Saint Jean. «Les autres Instituts, dit-elle, ont un fondateur
ou une fondatrice ; mais le nôtre en diffère précisément en cela
qu'il n'eut ni l'un ni l'autre. SON UNIQUE FONDATEUR EST LE CŒUR
DE JESUS-CHRIST».
Lorsqu'elle renouvela la Consécration de la Société à Marie
Immaculée, le 2 février 1855, elle composa cette prière
significative: «Vous l'avez bénie, cette petite Société, ô Marie,
lorsque Jésus l'enfanta sur le Calvaire et que, de son Cœur percé,
sortit avec son sang le dernier gage de son amour pour les hommes».
Et dans ses conférences, elle revenait volontiers sur la même
assurance: «C'est surtout à nous qu'il appartient d'avoir une
profonde dévotion pour ces mystères de la Croix, puisque, VOUS LE
SAVEZ, c'est dans le dernier acte de cruauté exercé sur la
personne adorable du Sauveur que notre Société A PRIS NAISSANCE:
c'est alors qu'a été révélée en quelque sorte la dévotion au
Sacré-Cœur».
Toujours elle tiendra à se référer, non pas spécialement aux
révélations privées, mais à la suprême révélation du Calvaire. «Vous n'ignorez pas que la dévotion au Cœur de Jésus remonte aux
premiers siècles de l'Eglise. Les Saints Pères en parlent dans
plusieurs de leurs écrits; il est probable que Saint Jean, au
moment où le soldat perça le côté de Notre Seigneur pour en
extraire les dernières gouttes de sang qui y restaient... comprit
dès lors les mystères d'amour renfermés dans ce Cœur adorable». Sans doute la mission de Sainte Madeleine-Sophie ressemblait-elle
partiellement à celle qu'avaient reçue, depuis les origines du
christianisme, tant d'âmes contemplatives. Notre Seigneur leur
avait déjà demandé de chercher dans son Cœur l'exemple parfait de
toutes les vertus et la source de la vraie sainteté; mais il est
certain que la mission dont Jésus-Christ voulait charger par
surcroît Sainte Madeleine-Sophie était tout spécialement
apostolique. C'est un fait évident. Doit-on dire que c'est un fait
nouveau ? L'histoire de la dévotion le suggère nettement. |
Jusqu'au XVIIe siècle, les révélations du
Cœur de Jésus qui ont précédé n'ont été connues que des moniales
de quelques grands monastères. La piété des fidèles les a pour
ainsi dire ignorées. Mais à cette époque, dans le sombre hiver du
Jansénisme, un progrès important est réalisé: deux Saints sont
suscités par Dieu pour réveiller l'amour dans les âmes craintives:
Saint Jean Eudes et Sainte Marguerite-Marie. Le premier se
consacre, avec un succès étonnant, à transformer cette dévotion en
culte liturgique - dont, selon la parole de Pie XI, il est
l'auteur - et déjà en 1672, il obtient que la fête du Cœur de
Jésus soit solennisée dans tous les séminaires de sa Congrégation.
Ainsi cette dévotion, confinée dans les monastères, devient-elle
un courant de piété officielle pour toute l'Eglise. Vers le même
temps, à Paray-le-Monial, Sainte Marguerite-Marie reçoit
les révélations dont personne n'ignore aujourd'hui l'importance.
Mais les appels pressants du Cœur de Jésus aux âmes auraient-ils
pu franchir les murs inviolables des Visitations si Notre Seigneur
n'avait chargé la Sainte cloîtrée de confier au Père de la
Colombière et à la Compagnie de Jésus tout entière le soin de les
propager dans le monde ? Or malgré cet appui, il fallut attendre
presque deux siècles avant que les paroles enflammées du Christ
fussent entendues par toute l'Eglise.
1. Les fondements de la Société
Et voici qu'après ce XVIIIe siècle écoulé
dans l'indifférence, Sainte Madeleine-Sophie Barat fonde sa
Société et lui donne comme fin principale une fin apostolique:
glorifier le Cœur de Jésus par l'éducation de la jeunesse. Cette
fondation, nouvelle dans sa fin comme dans ses moyens, attire
l'attention des Souverains Pontifes. Tous les Papes, au début du
XIXe siècle, témoignent à la Mère Barat et à son œuvre une
singulière protection et approuvent son Institut avec une chaleur
spéciale. Les Evêques de France et bientôt ceux de nombreuses
nations, manifestent la même estime. En cinquante ans, la Société
du Sacré-Cœur se propage à travers le monde et l'apostolat fondé
sur le Cœur de Jésus s'allume comme un incendie.
En même temps que la Société, poussée par
une grâce visible, répondait à sa mission, la Sainte Eglise, dans
les documents de ses Souverains Pontifes, attirait l'attention du
monde sur le Sacré-Cœur. La Mère Barat, qui eut toujours si fort
le sens de l'Eglise, avait comme pressenti l'essor de cette
dévotion fondamentale en orientant toute son œuvre dans le même
sens sauveur. Cette concordance de la progression d'une
Congrégation religieuse avec la pensée de l'Eglise est un fait et
un des caractères les plus marquants de l'œuvre de Sainte
Madeleine-Sophie. C'est pourquoi ce chapitre intéresse l'histoire
non seulement de la Société du Sacré-Cœur,mais celle de
l'apostolat dans la vie de l'Eglise. La croissance et l'extension
de la Société n'est pas un événement qui s'explique par des
raisons humaines, c'est un fait providentiel qui résulte d'une
intervention très particulière de Jésus-Christ.
Le problème de la cause toute surnaturelle
de ces victoires apostoliques pose quelques questions: la
Fondatrice avait-elle un plan de conquête? Suivait-elle dans ses
initiatives un ordre prévu ou avançait-elle sous un souffle plus
haut que les conseils humains? Quelles étaient ses ressources en
personnes et en argent? Comment put-elle former si hâtivement des
supérieures et des missionnaires capables de mener des entreprises
si imprévues? D'autres questions surgissent lorsqu'on se rappelle
les difficultés immenses qu'étaient à cette époque les départs
pour les missions lointaines, les voyages et les courriers, les
langues indigènes, les maladies inconnues, les persécutions, les
dangers de toutes sortes... Ces points d'interrogation ne sont pas
fictifs. Tous les jours des obstacles se sont levés en effet. Ils
auraient pu paralyser le courage et la confiance d'une fondatrice
qui se serait appuyée sur autre chose que sur la certitude de sa
mission divine. Mais une mission donnée par le Cœur de Jésus est
pour la volonté un ordre qu'on exécute les yeux fermés. C'est
pourquoi chaque étape de son histoire est captivante surtout par
la façon dont les montagnes qui se dressèrent devant les
entreprises successives, s'aplanirent d'elles-mêmes dès lors que
l'heure de Dieu avait sonné. «Obediens loquetur victorias» : On
obéissait et on réussissait.
Cette conquête se fera, en effet, au
rebours des conquêtes humaines préparées par de longues études
techniques. On attendra l'appel de Dieu. On se pliera aux
circonstances. On vivra dans le moment présent. On partira comme
les apôtres «sans argent dans la ceinture». On se tirera
d'affaire au jour le jour. On demandera au Père le pain quotidien.
A chaque jour suffit sa peine quand on fait l'œuvre de
Jésus-Christ. Bref, on risquera tous les jours davantage en
comptant sur la puissance du Cœur de Jésus. Si l'on considère le
point de départ et le point d'arrivée, entre les trois grains de
poussière qu'étaient Sainte Madeleine-Sophie et ses deux compagnes
rassemblées par le Père Varin et ce qu'était devenue la Société à
la mort de la Fondatrice, le 25 mai 1865, la disproportion est
énorme. «La Société comptait alors, écrit Mgr Baunard, 3.500
religieuses dans les deux mondes. Cent onze établissements avaient
été fondés sous la direction de la Mère Barat depuis 62 ans
qu'elle était à la tête de son Institut... Les Constitutions
avaient leur complément, l'administration tout son organisme et,
par la création d'une Vicaire générale, le passé se trouvait relié
à l'avenir. Enfin ce qu'elle n'avait pas fait, la Mère Barat
l'avait décidé, indiqué et consigné dans ses notes.»
2.
Amiens, le berceau de la Société (1801)
|
La ville d'Amiens, en Picardie, a
toujours été considérée par la Société du Sacré-Cœur comme son
berceau. Là, dès le début (1801), la Providence conduit tout dans
les ténèbres.
Un pensionnat sans avenir, une mission prêchée par
le Père Varin, la rencontre de deux âmes généreuses et dévouées
auxquelles il envoya Madeleine-Sophie, telles furent les premières
invitations imprévues du Saint-Esprit. «Nous nous occupions
surtout à répandre la dévotion au Sacré-Cœur», raconte Geneviève Deshayes. |
Et voici que sa compagne, Henriette Grosier, aspirante
au Carmel, comprend que l'institut de Madeleine-Sophie Barat, tel
que le présente le Père Varin, «c'est le Carmel avec l'apostolat
en plus». Bientôt elles se réunissent au nombre de quatre. Mais
que feront-elles? Ici le mot de Madeleine-Sophie est à remarquer:
«Nous n'en avions nulle idée». Et de son côté, Geneviève Deshayes écrit: «Nous marchions comme des personnes qui vont à
l'ombre, à tâtons; c'était la marche de la Providence envers nous». Elles s'installèrent dans une modeste habitation;
«une
mansarde en planches, prise sur le grenier, fut convertie en
chapelle: la première chapelle ouverte par le Sacré-Cœur!». «Oh!
heureuses étions-nous, dit l'une d'elles, dans ce pauvre réduit!». Heureuses surtout de commencer leur œuvre par la ressemblance
avec Jésus dans la Crèche. La première ébauche de la sainteté
propre au Sacré-Cœur est encore marquée de deux traits:
«L'obéissance, la mort à son propre jugement, la mortification
étaient notre boussole... Je vendis tout, je me serais vendue
moi-même». Et, avec l'obéissance, le Zèle: «Brûlant de zèle,
écrit toujours Geneviève Deshayes, la Sœur Sophie parlait de son
désir pour les missions du Canada». Le Saint-Esprit poursuit son
travail en leur inspirant d'ouvrir une classe gratuite pour les
enfants pauvres. Dans tout cela, Madeleine-Sophie voyait la
réalisation secrète des pensées que la méditation constante du
Cœur de Jésus entretenait au fond de son âme. Puis tout à coup, Il
semble Lui-même vouloir tout détruire. En 1804, elle tombe malade
et son cas s'aggrave au point qu'on la croit atteinte à mort.
Cependant Dieu lui rend ses forces et tout se remet à prospérer.
Telle est en miniature l'histoire providentielle de la Société
croissante.
3.
Rencontre de Philippine Duchesne
Cependant un grand événement va pour ainsi
dire faire bondir en avant l'œuvre chétive d'Amiens : la rencontre
de Philippine Duchesne. Le Père Varin, admirant la générosité et
les dons exceptionnels de cette âme pour l'apostolat, écrivait de
Grenoble: «Ah! en voilà une! Fût-elle seule au bout du
monde, vous devriez aller l'y chercher... On ne parle d'elle
qu'avec admiration». Cette union de Madeleine-Sophie et de
Philippine Duchesne est un des sommets de cette histoire. La
passion de la Sainte pour les missions lointaines croisant, comme
une flamme une autre flamme, les ardeurs conquérantes de
Philippine Duchesne, ne pourra que s'accroître jusqu'à la mort. La
jeune Philippine avait été élevée à la Visitation de Sainte Marie
d'En-Haut, à Grenoble.
A 18 ans, elle y entre comme
postulante. La révolution révèle sa charité et son courage. Elle
soigne les malades et les pauvres. «Laissez-moi, disait-elle,
c'est mon bonheur et ma gloire de servir Jésus-Christ dans la
personne des malheureux.» Ce cri du cœur n'était que l'écho d'un «SITIO» plus lointain. A l'âge de 8 ans, au récit fait par un
Jésuite, missionnaire de la Louisiane, elle avait avoué: «Le seul
mot de missionnaire ou de martyre faisait tressaillir mon cœur».
Veut-on connaître le fond de son âme? Qu'on écoute ses paroles en
apprenant qu'on lui concède la location de Sainte Marie d'En-Haut
convertie en prison: «Au sortir de la préfecture, mon premier soin
fut d'aller remercier Dieu de ses bienfaits chez un pauvre malade
que j'allais voir chaque jour. Il parut oublier ses maux pour ne
penser qu'à la nouvelle que je lui annonçais le premier, comme à
Jésus-Christ mon bon Maître, qu'il me représentait par ses
souffrances». Les pauvres, sacrement de Jésus-Christ, ceci est
encore un trait caractéristique de la Société future. Connaissant
par le Père Varin l'œuvre qui se fonde, Philippine Duchesne lui
demande d'entrer au Sacré-Cœur. Le Père Varin, ému par ces
événements providentiels, écrivait alors à la supérieure
d'Amiens: «Des âmes... des âmes... mais pour en gagner et
pour en former, il faut en avoir une non petite, non ordinaire,
mais grande, vaste, plus vaste que l'océan. Xavier n'a entrepris
la conquête de l'univers que parce qu'il avait une âme plus vaste
que l'univers». Madeleine-Sophie accepta le monastère de Sainte
Marie d'En-Haut que lui offrait Philippine Duchesne. Les
conversations de ces deux âmes se rencontrant pour la première
fois sont de celles qui ne laissent que des souvenirs
inexprimables: «Quelle fut la joie de cette journée mémorable,
dit Philippine, il est inutile d'en parler... Le moment est venu
pour moi de me taire. Il ne me reste plus qu'à obéir».
4.
Le Pape Pie VII bénit la Société
Une autre consolation attendait la Sainte
Mère sur sa route de retour: celle du passage à Lyon du
Pape Pie VII se rendant au sacre de Napoléon. Elle eut la grande
joie d'entendre Sa Sainteté bénir la nouvelle Société. Cette
bénédiction fut accompagnée de telles paroles qu'on ne douta plus
d'une protection spéciale de la Providence. Le grain de sénevé.
commençait à sortir de terre sa forte tige.
5.
Mère Barat est élue Supérieure générale (1806)
Le 18 janvier 1806, la Mère Barat est élue
Supérieure générale. Le Père Varin lui laisse avec confiance toute
la responsabilité. «Je sais, lui disait-il, que vous aurez
beaucoup à souffrir avant de voir la Société solidement établie.
Mais rien ne m'effraye parce que je sais que Notre Seigneur vous
donnera un cœur plus grand que toutes les souffrances, et un tel
cœur peut tout obtenir de celui de Jésus-Christ». Une fois de
plus le Père Varin avait vu juste.
|
Désormais, entre les mains de Sainte
Madeleine-Sophie, la marche va s'accélérer. Elle fonde un noviciat
à Poitiers. Huit postulantes en constituent le premier
noyau. L'une d'elles, Elisabeth Maillucheau, apportait au
Sacré-Cœur quelque chose de l'amour de Sainte Thérèse
d'Avila dont elle avait voulu prendre le nom en entrant au
noviciat. Elle avait, :le Jésus-Christ au Saint Sacrement,
un besoin insatiable qui lui faisait dire: «Je Le dévore et
Il me dévore». Cette dévotion passionnée pour la Sainte
Eucharistie sera une des notes de la spiritualité de la
Société. |
Pauvreté extrême, mortification intérieure, charitésans mesure, telles étaient les vertus qui
resplendissaient le plus dans ce noviciat. La Sainte Mère formait
elle-même ses novices: «Il y avait dans sa personne je ne sais
quoi de Jésus qui nous allait à l'âme», rapporte la Sœur Thérèse;
«nous sentions que nous avions une sainte parmi nous».
Trois fondations suivirent celle de Poitiers dans la seule"
année 1808 : Niort, Gand et Cuignières. La
pauvreté y fut à l'honneur. A Niort, elle semblait même
excessive: la demeure était, dit-on, une sorte de prison que
chaque averse venait inonder; une seule pièce pour toutes, servant
de classe le jour, de salle de communauté le soir et de dortoir la
nuit; un seul fagot par jour pour chauffer la maison; une seule
chandelle pour l'éclairer. Mais le tabernacle était tout: à l'une
de ses filles qui se désolait du départ de la Mère Duchesne, à
Grenoble: «Ma fille, répondit vivement la Supérieure, la Mère
Duchesne a-t-elle emporté la clef du tabernacle?» Le Cœur de
Jésus dans l'Eucharistie était déjà l'unique trésor de chaque
maison, trésor d'une richesse infinie.
6.
Une crise se prépare...
Cependant, à l'intérieur même de la
Société, une crise se préparait. Peu d'Ordres religieux ont
échappé dans leurs débuts à une discorde grave, suscitée par le
démon. Cet épisode que nous ne pouvons raconter que très
brièvement devait, grâce à la sagesse de la Sainte Fondatrice et à
la protection du Sacré-Cœur, hâter la croissance de la Société et
la faire progresser sans détours vers la même ligne. C'est à ce
titre qu'il mérite l'intérêt: L'aumônier d'Amiens, qu'on avait
invité à collaborer avec le P. Varin et le P. Druilhet pour donner
à la Société ses Constitutions, s'imagina qu'il était appelé au
rôle de premier Fondateur. Il se fit illusion au point de rédiger
des Constitutions si opposées à l'esprit primitif, que la majorité
des religieuses ne put les accepter. Quelques-unes. cependant, en
particulier celles de Gand (Belgique), croyant à une
certaine approbation de Rome s'attachèrent à l'abbé de
Saint-Estève et se séparèrent de la Fondatrice. L'œuvre de M. de
Saint-Estève ne répondait plus aux lumières et à la volonté de
Jésus crucifié manifestées à Sainte Madeleine-Sophie, le culte et
le nom du Sacré-Cœur étaient supprimés. On reconnut bientôt que le
pseudo fondateur ne méritait ni l'estime ni l'approbation de ses
amis et de ses protecteurs. Il fut misérablement abandonné. Cet
incident ne vaudrait pas d;être rappelé s'il ne marquait un fait
très important: on vit, en effet, qu'une croissance spirituelle,
plus rapide et plus profonde que le développement extérieur de la
Société, accompagnait toutes les initiatives de la Sainte
Fondatrice. Le résultat de cette crise intérieure fut une
confirmation de la dévotion au Sacré-Cœur et du but essentiel à
poursuivre, une union plus étroite entre toutes les religieuses,
une confiance accrue dans le Cœur de Jésus, et surtout une mise au
point plus ferme et plus rapide des Constitutions. Le fruit
précoce de cette épreuve, le Cardinal Recanati se chargea de le
faire goûter aux Mères qui avaient retrouvé unanimement la joie,
la paix, la ferveur et le zèle conquérant: «J'ai lu par devoir les
Constitutions de presque tous les Ordres, soit anciens, soit
modernes. Toutes sont belles, admirablement marquées du sceau de
Dieu. Mais celle-ci m'a paru exceller entre toutes parce qu'elle
renferme l'essence de la perfection religieuse et qu'elle est en
même temps un chef-d'œuvre d'unité. Le Sacré-Cœur de Jésus est à
la fois le pivot sur lequel tout se meut, et le terme où tout
aboutit». La Mère Générale fera ressortir ce caractère essentiel
en écrivant à toutes les maisons au sujet des Constitutions: «Le
principe sur lequel notre Société est fondée est la dévotion au
Sacré-Cœur de Jésus. Elle doit être tellement dévouée à la gloire
et au culte de ce Divin Cœur que tous ses travaux et fonctions se
rapportent à Lui comme à leur dernière fin... Cette fin est celle
que Dieu s'est plu à manifester dès l'origine de notre Société».
Une nouvelle étape s'achevait donc sur un espoir sans limites.
Nous sommes en 1815.
7.
A la conquête de l'Amérique (1817)
Pendant que les autres maisons prospèrent,
la Mère générale ouvre en 1816 un important noviciat à Paris.
Le Père Roger, maître des novices de la Compagnie de Jésus, prêche
une retraite de quinze jours, et les âmes prêtes à tout,
commencent à s'initier avec générosité aux «vertus solides». Et
voici arrivée l'heure providentielle, longtemps désirée, prévue et
préparée, d'une extension de l'apostolat du Sacré-Cœur en
Amérique. Le 16 mai 1817, Mgr Dubourg, évêque de la Louisiane,
obtient de la Mère générale le départ de la Mère Duchesne pour les
Etats-Unis; On lui donne pour compagnes deux Mères et deux Sœurs
coadjutrices dont les noms méritent d'être retenus: Mère Octavie
Berthold et Mère Eugénie Audé; Sœur Catherine Lamarre et Sœur
Marguerite Manteau. La traversée dure deux mois. Elle est pour
ainsi dire une image du voyage de la Société en ce monde. «Les
mauvais temps, les vents contraires, d'épouvantables tempêtes, le
tropique passé et repassé cinq fois, d'insupportables chaleurs,
l'infection et l'insalubrité du vaisseau, des commencements
d'incendie, la rencontre d'un corsaire leur avaient fait courir
des périls extrêmes et continuels.» Le 25 mai 1818, la Rebecca
entre dans les eaux du Mississipi. Le 29, cette année-là,
jour de la fête du Sacré-Cœur, on débarque. Durant cinq semaines,
les Sœurs naviguent de nouveau sur le Mississipi. Ce fut
pour ainsi dire un raid indescriptible. Les lettres venues
d'Amérique excitent la générosité de toute la Société.
Dès le
début, le Pape Pie VII avait béni la mission, et sous cette
bénédiction, la croissance de la Société en Amérique est
celle d'une flamme qui propage l'incendie. En 1952, on comptera
aux Etats-Unis trente maisons prospères, cinq au Canada
et cinq au Mexique.
En même temps, cette flamme ne cesse de courir en France et à
l'étranger. De 1818 à 1830, de nouvelles fondations se succèdent
en dépit des obstacles: Chambéry, la Ferrandière et plus
tard la rue Boissac à Lyon, Bordeaux, Paris
(hôtel Biron), Besançon, Autun, Metz,
Perpignan et Lille. De grands pas sont faits dans tous
les domaines: organisation, spiritualité, traditions et discipline
religieuses, formation des novices, œuvre de l'éducation.
8.
Léon XII publie le Bref d'approbation de la Société (1826)
Quatre Conseils généraux se sont déjà
réunis pour établir plus solidement les fondements de la vie
intérieure et de l'apostolat. Tout est mené vivement, et la
bénédiction de Dieu est de plus en plus abondante. Une demande
d'approbation de l'Institut a été présentée, au Pape Léon XII et
le Cardinal Bertazzoli écrit: «Le Pape aime votre œuvre; lui-même
me l'a dit». Le 22 décembre 1826, le Saint Père publie le Bref
d'approbation de la Société. La Mère générale ne laisse pas passer
cette grâce sans stimuler la ferveur de ses filles: «Ne portons
pas en vain le nom du Cœur de Jésus, écrit-elle. Il vient de nous
être donné par le Chef de l'Eglise, à la face du ciel et de la
terre. Quelles obligations il nous impose! Vie de souffrance et
d'immolation, état continuel de victime pour le salut des âmes: à
quel degré de perfection ne devons-nous pas atteindre pour remplir
cette céleste vocation!».
La Société, déjà demandée à Turin,
l'est encore plus à Rome. Elle y aborde en 1828 avec une
expérience, des garanties, et une protection assurée de la Sainte
Eglise. Le Pape lui-même était intervenu pour installer les
religieuses du Sacré-Cœur au Centre de la Chrétienté. A sa
demande, le gouvernement français accordait la jouissance du
couvent et de l'église de la Trinité des Monts à la Société du
Sacré-Cœur. La joie était grande, mais la croix l'accompagnait
toujours et la blessure du cœur s'élargissait chaque année: cette
belle période de croissance se poursuit en ligne droite vers le
sommet du Calvaire.
Ce qui faisait alors le plus souffrir
Sainte Madeleine-Sophie, beaucoup plus que les épreuves multiples
(ruines, épidémies, maladies ou morts imprévues), beaucoup plus
que ses propres souffrances, c'était cette grâce douloureuse de
compassion et de réparation qui lui venait du Cœur de Jésus comme
une participation toujours plus intime à la Blessure divine:
«Combien nous souffrons maintenant de voir tant de scandales,
d'entendre tant d'horreurs! écrivait-elle en mars 1829. Comment
nos enfants pourront-elles résister à ce torrent?... Il faut bien
pâtir, et c'est surtout dans ce temps malheureux où Dieu est tant
offensé que chacune de nous devrait devenir une victime pour les
péchés des hommes».
Le sens de l'expiation, de la réparation et
de la rédemption, après trente années d'existence, devenait de
plus en plus dominant dans sa spiritualité. Les événements lui
enseignaient peu à peu ces voies de Dieu déjà découvertes dans la
contemplation du Cœur percé de Jésus. Cette loi de croissance ne
changera jamais pour la Société.
9.
La révolution de 1830
L'année 1830 ne fait qu'aggraver la
situation. Mais la lumière, la force, le courage, la charité, le
don de soi croissent avec les exigences toujours plus étendues de
l'apostolat. Il faut se garder de dire qu'un ordre religieux,
accablé d'épreuves est en décadence. Au contraire, les maux qui
fondent sur lui le font progresser plus rapidement dans sa
vocation. C'est pourquoi la marche en avant de la Société ne fut
pas interrompue par les tristes événements qu'il faut rappeler
brièvement. La maladie s'acharne sur la Mère générale: «Il me
semble parfois, disait-elle, qu'un animal caché me ronge jusqu'aux
os». En même temps, les souffrances morales se multiplient: «Tous
les courriers m'apportent la nouvelle de quelque désastre, écrit
la Sainte Mère; peut-être m'y accoutumerai-je, mais je n'en dors
pas». Cependant Dieu augmente sa force d'âme et sa vertu:
«L'abandon au bon plaisir de Dieu, ajoute-t-elle, détruit la
crainte et produit la paix qui surpasse tout sentiment». .
C'est l'heure des grandes épreuves: à
Lyon la guerre civile fait rage. «Voilà six jours entiers,
écrit-on à la Mère générale, que nous sommes cernées et enfermées
chez nous, environnées de troupes et de trains d'artillerie...
Jour et nuit nous n'entendons qu'un roulement de canon - presque
sans interruption, joint à une fusillade opiniâtre et meurtrière.» Le choléra sévit à Paris d'où lui arrive ce cri de
détresse: «Paris est devenu la cité de la mort». La Mère rassure
ses filles: «Votre porte est marquée du sang de l'Agneau, l'ange
exterminateur ne vous frappera pas». Mais qu'apprend-on tout à
coup? Le choléra dévaste la basse Louisiane. La Mère Audé
n'est pas plus tranquille à Marseille. «Douze cents
personnes succombent chaque jour.» Bientôt la contagion envahit
Naples, puis Rome. A la Trinité des Monts, six
religieuses meurent pendant la seule semaine de l'Assomption. Au
milieu de ces épreuves, la ferveur du zèle et du dévouement
augmente chaque jour. On secourt les malades. et les pauvres. A
l'exemple de leur Mère, plusieurs offrent leur vie pour écarter
ces malheurs. Le désir du martyre gagne les âmes les plus
ardentes. La Sainte Mère elle-même manifeste au Colisée la joie
qu'elle aurait de mourir pour Jésus-Christ.
10.
La crise de 1839
|
Vraiment la Société est exaucée dans son
désir de ressembler à Jésus-Christ crucifié. Cependant les
épreuves de l'extérieur ne sont rien en comparaison de celles qui
plongent leurs racines à la source même de l'Institut. La crise de
1839, comme on l'appelle dans l'histoire de la Société, menace
l'unité même du corps religieux. C'est dans son plus intime
entourage et parmi ses filles les plus chères que Sainte
Madeleine-Sophie va rencontrer l'opposition d'abord latente puis
ouverte. |
Le seul désir d'un plus grand bien séduit
sans nul doute les esprits, mais l'illusion sincère qui entrevoit
ce bien en dehors de la pensée de la Fondatrice et qui. tend à
faire dévier la Société de la ligne très pure de ses
Constitutions, va la conduire aux portes de l'abîme. D'une part,
une assimilation trop étroite aux Constitutions de la Compagnie de
Jésus, alors que Sainte Madeleine-Sophie avait si bien su les adapter au caractère
d'un ordre féminin et les marquer du cachet original de la
dévotion au Sacré-Cœur, d'autre part, l'établissement prématuré du
centre de la Société à Rome, alors que les tendances
gallicanes des Evêques les plus influents de France risquaient
d'entraîner des ruptures désastreuses, tel fut en résumé le double
ébranlement qui secoua jusque dans ses fondements la Société du
Sacré-Cœur.
A travers les heures douloureuses de cette
phase de quatre années, la Sainte étroitement unie à ce Cœur
duquel elle attendait tout, n'opposera à l'orage qu'humilité et
charité. «Prier, souffrir, attendre, se taire», tel sera le
simple héroïsme de sa vertu. Peu à peu cependant, les profonds
remous qui se font sentir à l'intérieur de l'Institut, montrent
que l'on fait fausse route. La souffrance et le silence de la
Fondatrice portent leur fruit de vérité. Une fois de plus, c'est
de Rome que vient la solution. Par un acte souverain, le
Pape Grégoire XVI remet la Société dans son vrai chemin, la rend à
la pureté de ses Constitutions, à la ligne très sûre de son
véritable esprit et donc aux desseins d'amour du Cœur de Jésus sur
elle. La sainteté de la Mère Barat a fait un bond magnifique dans
cette rude épreuve, qui d'ailleurs, fait remarquable, resta
ignorée de la plupart des religieuses. Au prix de sa longue et.
silencieuse prière comme de sa charité invincible, elle avait
acheté l'unanimité qui triomphait dans toute la Société. Cette
unanimité aura pris dès lors une force de cohésion si puissante,
que désormais, ni secousse, ni tempête ne parviendront à
l'ébranler. Au cours de son histoire déjà longue, cette unanimité
restera le plus riche trésor d'une Société qui n'aura plus «qu'un
cœur et qu'une âme».
Le souffle qui éteint le feu attise aussi
la flamme. En ces années d'épreuve, on réclame partout des
fondations: nombreuses villes d'Amérique, d'Italie
et de France, Pérou, Algérie et Empire
Birman, Galicie, Angleterre, Irlande,
Espagne, Autriche et Hollande.
Mais selon le rythme providentiel, les
épreuves succèdent aux victoires ou les précèdent. «De mauvaises
nouvelles nous arrivent des attaques italiennes contre l'Eglise et
des émeutes de Pise. Je ne saurais vous dire ce que nous
avons à souffrir de toutes parts» écrit Sainte Madeleine-Sophie à
cette époque. Mais elle estime que se plaindre serait une «lâcheté». «Jésus ne reconnaîtra pour ses vraies épouses que
celles qui portent ses marques; et comme nous ne pouvons espérer
le martyre, il faut y suppléer par celui de l'âme. Je voudrais que
toutes nous comprissions cette vérité... Ce n'est pas assez: il
faudrait la goûter, l'aimer, la pratiquer».
De fait, le Sacré-Cœur est chassé de
Turin (1848), puis de Pignerol et de Saluces, de
Parme et de Gênes. Bientôt le siège de Rome
ajoute à tant de douleurs, celle de savoir le Saint Père lui-même
menacé. «A Rome, écrit-elle, tout s'écroule. Notre Noviciat est
saccagé. Sainte Rufine à peu près; la Trinité, où se sont réunies
en partie nos trois Communautés, reste seule encore intacte, Dieu
les protège visiblement.»
11.
La mort du Père Varin (1850)
C'est à travers ces bouleversements que la
Société achève le premier tournant de son histoire. L'année 1850
s'ouvre par la sainte mort du Père Varin, qui n'a cessé jusqu'au
bout de lui redire: «Courage et confiance». C'est le
cinquantième anniversaire de sa première Consécration au
Sacré-Cœur, signe visible d'un progrès spirituel et apostolique
incessant. Une nouvelle vague de fondations s'élance à la conquête
des âmes dans l'ancien et le nouveau Monde. Là, tandis que la
vitalité de l'œuvre se manifeste d'une manière, on peut le dire,
exceptionnelle, l'indomptable Mère Duchesne dévorée par la flamme
du zèle du Cœur de Jésus-Christ, a rendu les armes. Après
trente-quatre ans d'héroïque apostolat et d'une abnégation plus
héroïque encore, elle meurt comme une sainte, dans l'humilité et
l'amour (1852). Ce coup, si sensible au cœur de la Sainte Mère Barat, n'ébranle pas son courage. Ses premières compagnes ont
presque toutes disparu.
12.
Reconnaissance, et décès de la Fondatrice (1864-1865)
|
Treize ans encore, elle travaille à
l'affermissement de la Société sur tous les plans. Un huitième
Conseil général met enfin le sceau à son immense labeur de
Fondatrice. Ouvert le 17 juin 1864, il est comme l'achèvement de
son œuvre. La parole de Sainte Madeleine-Sophie fut plus féconde
alors que ces pluies chaudes qui font parfois germer en
quelques jours ou même en quelques heures, toute une
abondante semence. Les progrès spirituels qui furent
accomplis pendant ses dernières années sont trop profonds
pour être racontés. |
C'est ainsi que la croissance d'un ordre
religieux échappe en partie à l'Histoire. Lorsqu'en 1865, épuisée
par le travail, la Sainte Mère tombe sur la brèche, elle avait
encore ouvert à la Société, le Canada,
l'Allemagne, le Chili et Cuba. Mais elle
laissait à sa famille religieuse plus que l'héritage d'un grand
apostolat. Elle l'avait affermie par son exemple et ses leçons
dans la solidité de sa foi au Cœur percé de Jésus sur la Croix. Là
elle avait tout puisé. Elle léguait à la Société la grâce de
savoir, à n'en pouvoir jamais douter, que là aussi était pour elle
la source de toute croissance spirituelle et de toute fécondité
apostolique.
13. L'héritage...
Cette loi de croissance et de fécondité
régira désormais l'histoire de la Société sur le même rythme de
victoires et d'épreuves. Après le Généralat de la T.R. Mère Gœtz
qui eut à faire face à la persécution du Kulturkampf d'Allemagne,
celui de la T.R. Mère Lehon fut une époque de magnifique
efflorescence. En vingt ans, 53 foyers du Sacré-Cœur sont fondés;
la flamme se propage en 7 nouveaux pays et jusqu'en Océanie.
Le Généralat de la T.R. Mère Mabel Digby, femme forte s'il en fût,
fut une victoire de Vendredi-Saint. L'effort inique des lois
d'expulsion qui chassait les Ordres religieux de France
(1903-1909) aboutit, pour la Société du Sacré-Cœur, à la fermeture
de 46 maisons. C'était aussi 2.500 religieuses sans abri. La
Supérieure Générale fit face à l'épreuve magistralement. Pour
toutes, elle trouva non seulement un asile mais un apostolat. Si
un pays fermait ses portes, d'autres ouvraient les leurs. Les
maisons d'Europe et d'Amérique accueillirent les
réfugiées avec une charité exemplaire: on se serra, on se
dépouilla, on s'aima surtout. Les fondations se multiplièrent:
pour 46 tabernacles fermés, 60 furent ouverts au Cœur de Jésus;
neuf pays nouveaux furent atteints et, avec les maisons d'Egypte
et du Japon, la Société se trouva bientôt dans les cinq
parties du monde.
La T.R. Mère Stuart se donna pour programme
de visiter personnellement ses 140 maisons. Elle entreprit pour le
réaliser le tour du monde qui épuisa ses forces. Dès son retour,
la grande guerre éclata (1914). Sous le poids de l'angoisse du
monde, elle succomba, laissant à ses 6.500 filles l'exemple d'une
haute sainteté.
Les persécutions du Mexique, la
révolution d'Espagne, la guerre dévastatrice de 1940, la
mainmise communiste sur les maisons de Hongrie et de
Chine marquent les généralats suivants. C'est le prix de 72
nouvelles fondations, du renouveau des maisons de France,
d'Espagne, d'Autriche et d'Allemagne, d'une
efflorescence de vocations magnifique en plusieurs pays et de
l'expansion missionnaire de la Société.
Ainsi se termine, parcourue à vol d'oiseau,
l'histoire de l'œuvre que le Cœur de Jésus avait demandé à Sainte
Madeleine-Sophie d'accomplir pour la gloire de son amour. Doit-on
dire que ce n'est qu'un commencement ? Assurément, si l'on a
confiance que Jésus n'abandonnera jamais son grand dessein que
Saint Paul appelle «le mystère du Christ», à savoir de révéler au
monde, pour glorifier son Père, les richesses infinies de ce Cœur
percé qui a donné naissance à la Sainte Eglise et perpétuelle
fécondité à son apostolat. |